Des victimes de l’insémination artisanale

Il y aurait 300,000 enfants adoptés au Québec entre les années 1920 et 1970. Le Canada estime à 600,000 enfants le nombre d’enfants adoptés au pays de 1945 à 1971. Le Sénat reconnait que ce nombre est imprécis, vu le contexte relié à cette page sombre de l’histoire. Il y a également eu le trafic des bébés à Montréal dont on ne connait pas le nombre. Toutes ces personnes et celles qui sont concernées (parents biologiques, fratries et familles élargies, tentent de retrouver leur antécédents biologiques, leurs familles, bref les morceaux manquants de leur identité. S’ajoute également à cette liste les 150,000 Amérindiens victimes des pensionnats Canadiens. (Voir un vidéo récent dans la section racisme). On doit maintenant ajouter à cette liste des milliers d’enfants dont le nombre est à ce jour inconnu, je parle ici des enfants conçus par procréation assistée, car il n’y a pas de registre national des donneurs. Ici aussi, on ne peut déterminer le nombre d’enfants concernés. Hier, les médias ont levé le voile sur une autre réalité; l’insémination artisanale, où la procréation a lieu à l’aide de donneurs trouvés sur internet. Une fois de plus, on ne peut savoir le nombre d’enfants concernés. Comme vous pourrez le voir, il sera d’autant plus difficiles pour ces enfants de trouver leurs antécédents, leurs familles, car s’ajoute à cette réalité des donneurs de sperme hyperactifs.

Exceptionnellement, il y a deux vidéos. Le premier, réalisé par Radio-Canada traite de l’insémination artisanale alors que  dans le deuxième, il y a le témoignage d’Audrey, qui a été conçue par procréation assistée, qui est très révélatrice de cette réalité. Je trouvais important que vous puissiez le voir si ce n’est déjà fait, car je l’avais publié le 19 juillet dernier sous la rubrique vidéo adoption.  Vous pourrez constater la complexité de la situation , et la similitude avec les enfants adoptés quant à leurs besoins identitaires.

Les bébés des annonces classées

Isabelle, fin trentaine, voulait avoir un enfant avant de ne plus être en âge de procréer. Grâce à un donneur trouvé sur Internet dans les petites annonces, elle donne naissance à un garçon, ce qui la remplit de joie. Mais depuis, après avoir compris que son donneur était possiblement le père de nombreux enfants, elle craint une situation à la Starbuck.

 

Cette découverte, c’est bien par hasard qu’elle l’a faite.

Peu après la naissance de son enfant, Isabelle, un nom fictif que nous avons choisi pour protéger l’identité de son enfant, s’inscrit sur plusieurs forums de discussion, dont certains sur Facebook, pour tenter de savoir si son enfant avait des demi-frères ou des demi-sœurs.

Or, grâce à des messages échangés avec d’autres femmes ayant aussi reçu un don de sperme grâce aux petites annonces, elle soupçonne aujourd’hui que son donneur pourrait être le géniteur d’une trentaine d’enfants, rien que dans le grand Montréal.

Ébranlée, Isabelle s’est donc résolue à briser le silence pour que les politiciens prennent conscience de l’importance de ce marché parallèle qui s’est créé en contravention avec la loi fédérale

nfant, Isabelle, un nom fictif que nous avons choisi pour protéger l’identité de son enfant, s’inscrit sur plusieurs forums de discussion, dont certains sur Facebook, pour tenter de savoir si son enfant avait des demi-frères ou des demi-sœurs.

Or, grâce à des messages échangés avec d’autres femmes ayant aussi reçu un don de sperme grâce aux petites annonces, elle soupçonne aujourd’hui que son donneur pourrait être le géniteur d’une trentaine d’enfants, rien que dans le grand Montréal.

Ébranlée, Isabelle s’est donc résolue à briser le silence pour que les politiciens prennent conscience de l’importance de ce marché parallèle qui s’est créé en contravention avec la loi fédérale sur la procréation assistée.

Loin d’être la seule

En regardant les annonces sur le site Internet sur lequel Isabelle a déniché son donneur, on se rend compte qu’elle est loin d’être la seule dans sa situation.

Seulement dans les dernières semaines, des dizaines de femmes ont placé une annonce pour trouver, elles aussi, un donneur de sperme.

Et une fois le donneur trouvé, tout est d’une désarmante simplicité.

Pour Isabelle, il n’aura fallu qu’une preuve récente d’absence d’infection transmise sexuellement et quelques rencontres pour qu’elle accepte le don de sperme du géniteur de son garçon, un homme dans la mi-vingtaine, remis dans un petit pot.

Joint par Radio-Canada, ce dernier a refusé nos demandes d’entrevue.

Pourquoi pas les cliniques de fertilité au privé?

Le recours aux petites annonces n’est bien sûr pas la seule avenue existante pour les femmes souhaitant procréer. Les cliniques de fertilité existent et elles sont nombreuses. Mais elles ne plaisent pas à toutes.

Mélodie, une amie d’Isabelle, s’est tournée vers les petites annonces après avoir d’abord emprunté la voie légale.

Seulement, elle a détesté son expérience en clinique privée où une dizaine de femmes attendent dans des cabines que le médecin vienne les inséminer. Un acte qui dure une quarantaine de secondes, qui lui a donné l’impression d’être du bétail.

Les coûts ont aussi contribué à sa décision. C’est que l’insémination assistée en clinique de fertilité n’est pas totalement gratuite.

« L’acte en tant que tel, ça ne coûte rien et c’est couvert par la RAMQ. La paillette [l’échantillon] en tant que telle, ça peut varier de 700 $ à 900 $ la fois », et encore, poursuit-elle, puisque pour bien des gens « ça ne fonctionne pas du premier coup : si on fait le calcul on est rendu à s’hypothéquer une maison ».

L’histoire de leur amitié, en passant, n’est pas banale : Mélodie a en effet connu Isabelle après avoir été approchée sur Internet par le même géniteur.

Inquiétudes dans le monde médical

Dès 2010, Santé Canada avait connaissance des dons de sperme sur Internet. L’agence avait d’ailleurs mis en garde par deux fois les futures mères des risques pour la santé.

Mais il demeure qu’aucune loi, jusqu’ici, n’est venue réglementer le nombre de dons de sperme pour un même géniteur, ce que souhaitent Mélodie et Isabelle.

Ce flou qui persiste dans la loi ouvre la porte à des donneurs à grande échelle, comme dans le cas d’Isabelle, un enjeu qui avait inspiré à Martin Petit et Ken Scott le scénario du film Starbuck, sorti en 2011, et dont le personnage principal était le géniteur de 533 enfants.

Mélodie et Isabelle s’inquiètent des risques éventuels de consanguinité que pourrait entraîner la multiplication de ces enfants nés de mêmes géniteurs, d’où l’intérêt d’en finir avec l’anonymat des géniteurs.

« C’est surtout ce côté-là, côté maladie, côté éthique, côté moral… C’est particulier », indique Mélodie.

Emmanuelle Marceau, experte en droit et éthique à l’École de santé publique de l’Université de Montréal (ESPUM), affirme que les revendications exprimées par ces femmes méritent un débat parlementaire. La spécialiste en éthique croit donc que la création d’un comité mixte au fédéral pour débattre de cet enjeu serait appropriée.Surtout que la distribution de sperme sur Internet, apparue il y a une dizaine d’années, ne semble pas en voie de disparaître.

« Le droit tarde souvent à encadrer des réalités sociales qui évoluent très rapidement », indique la juriste de formation.

Toutefois, il ne sera pas simple de trancher dans ce débat. Au fil du temps, la loi sur la procréation assistée de 2004, qui est soumise d’ailleurs à la Charte des droits et libertés au Canada, a navigué de compromis en compromis pour faire appliquer des règles.

« On a fait le choix, présentement dans notre société, de préserver l’anonymat des donneurs. Mais d’un autre côté, pour le droit des mères et pour les enfants à naître, c’est le droit à l’information, à la transparence. Et là, dans le cas des dons multiples, ça peut avoir des répercussions sur l’enfant à naître, ne serait-ce qu’au niveau du bagage génétique. »

Santé Canada réagit aux revendications

La loi sur la procréation assistée prévoyait la mise sur pied d’une agence canadienne de contrôle de la procréation assistée, chargée de recueillir, d’analyser et de gérer des renseignements médicaux.

Répertorier les donneurs aurait pu se retrouver dans ses attributions.

L’agence n’a cependant pu voir le jour, la Cour suprême du Canada ayant statué, en 2010, que Santé Canada n’avait pas le pouvoir de créer un registre de donneurs, puisqu’elle empiéterait sur les compétences des provinces.

Santé Canada tient actuellement des consultations publiques pour renforcer cette loi.

Cependant, la question de l’anonymat du donneur de sperme et du droit à savoir des enfants à naître ne sont pas inclus dans le projet réglementaire.

 

 

 

Vidéo  Enfants conçus par insémination

 

 

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