Briser les chaînons manquants de l’adoption

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Briser les chaînons manquants de l’adoption

Publié le mardi 31 juillet 2018 Radio-Canada

300 000 personnes pourraient demander accès à leurs dossiers d’adoption grâce à la nouvelle loi 113 du gouvernement du Québec. Photo : Radio-Canada

La loi 113 est entrée en vigueur le 16 juin 2018 au Québec. Cette loi permet aux orphelins et aux enfants adoptés de pouvoir connaître l’identité de leurs parents biologiques. Nos archives témoignent du long chemin parcouru pour acquérir la possibilité de retracer ses origines au Québec.

Une loi qui permet d’identifier les chaînons manquants

La loi 113 lève potentiellement le sceau de la confidentialité à propos de 300 000 dossiers existants dans les archives du gouvernement du Québec. Dans un premier temps, ces archives seront ouvertes pour tous les orphelins et enfants adoptés dont les parents biologiques sont décédés depuis plus d’un an.

Dans un deuxième volet, les orphelins et enfants adoptés dont les parents biologiques sont toujours vivants devront attendre jusqu’en 2019. Les parents biologiques encore vivants peuvent opposer un droit de veto au dévoilement de leur identité. Ce veto disparaîtra cependant à leur décès.

Le nouveau dispositif légal est le fruit de plusieurs décennies de mobilisation de la part de parents naturels et d’enfants adoptés impatients de renouer les liens filiaux.

Briser le mur du silence

Au Québec, mettre un enfant au monde hors des liens du mariage a longtemps constitué un énorme tabou dans une société encore profondément influencée par la morale catholique.

Retrouver son parent naturel ou son enfant a longtemps relevé du chemin du combattant. Les dossiers d’adoption étaient inaccessibles sauf en cas de force majeure comme une maladie héréditaire.

Le mur du silence légal est très difficile à abattre.

L’animateur de l’émission Au jour le jour Normand Harvey reçoit, le 9 décembre 1982, Reine Landry. L’invitée dirige l’Agence de recherche pour enfants abandonnés ou adoptés (AREA) à Montréal.

Reine Landry s’efforce de trouver son fils de 17 ans. Elle se contient en entrevue avec Normand Harvey, mais n’est pas très contente de la situation.

À l’époque, le département des services sociaux de la région de Montréal avait mis sur pied un projet pilote innovant. À la suite d’une requête d’accès à l’information de la part d’un enfant adopté, on sollicitait les parents naturels pour favoriser les rencontres.

Mais le 11 juin 1982, le gouvernement du Québec promulgue une loi réformant le droit de la famille, la loi 18. Reine Landry s’en désole.

Non seulement la loi 18 maintient la notion de confidentialité que Reine Landry aurait voulu voir abolie, mais la loi contient également un important recul.

Plus particulièrement, elle interdit la sollicitation auprès des parents naturels. Cette disposition invalide le projet pilote du département des services sociaux de Montréal.

On a fait des visites chez les députés, les ministres pour les sensibiliser. Mais ce problème-là, il n’est pas connu jusqu’à maintenant. […] Les mères n’en ont pas parlé. Même les adoptés en parlaient très peu. Alors, il faut mettre ce problème-là sur la place publique pour amener les gens à appuyer nos revendications qui sont de faire reconnaître le droit aux origines […]

Reine Landry

Les pressions sur Québec ne donnent rien. Par contre, il y a du mouvement ailleurs au Canada.

En Colombie-Britannique, comme nous le raconte le journaliste Benoît Giasson dans un reportage présenté au Téléjournal le 4 novembre 1996, le gouvernement néo-démocrate entérine une loi qui autorise la divulgation d’information dans les dossiers d’adoption.

Le jour de la mise en place du programme, les gens aux quatre coins de la province se pressent pour entamer la procédure de renseignement.

Au Québec, pendant ce temps, devant le mur créé par les instances gouvernementales, c’est la société civile qui met en place des mécanismes parallèles favorisant les retrouvailles filiales.

En 1983, Reine Landry fonde le Mouvement Retrouvailles. Son action fait en sorte que des centaines d’enfants adoptés et de parents naturels renouent les liens brisés.

C’est le cas de Léona Gignac-Marchand qui retrouve sa fille, Marie-Gracieuse, après 35 ans de recherches infructueuses. Cette rencontre émouvante des deux femmes fait l’objet d’un reportage de la journaliste Louise Beaudoin présenté au bulletin de nouvelles Ce soir le 9 février 1983.

 C’est la plus belle récompense de ma vie. Ça ne se peut pas!

Le Québec est une des dernières provinces canadiennes à ouvrir les archives de l’adoption.

Pour ceux et celles qui voudraient entreprendre une démarche d’accès à l’information, le gouvernement du Québec a mis sur pied une équipe, ainsi qu’une ligne téléphonique sans frais, pour aider les gens dans leurs démarches.

Le numéro à composer est le 1 888 441-7889. Beaucoup de gens appellent à ce numéro.

2 commentaires sur « Briser les chaînons manquants de l’adoption »

    1. Ces scandales, ces sombres pages de l’histoire, et la mainmise du clergé ont contribué à la non-reconnaissance des torts causés aux adoptés, non-adoptés, parents et enfants de Duplessis. Alors le Québec n’était pas pressé de lever le voile sur la confidentialité de la loi de l’adoption, je dirais qu’ainsi on empêchait de réécrire ce sombre passé,au grand jour permettant ainsi à l’ensemble de la population de le connaitre…

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