REPORTAGE 2003-01-07 LES ENFANTS DU PÉCHÉ
Adopter : prendre légalement pour fils ou pour fille, considérer comme son propre enfant. |
Dans les années 1950 et 1960, les crèches québécoises accueillaient des milliers d’enfants. Les sociétés d’adoption de l’époque avaient pour mission de placer, en premier lieu, ces enfants au sein de bonnes familles québécoises ou canadiennes. Il faut préciser qu’à cette époque, une femme non mariée qui tombait enceinte pouvait s’attendre à la réprobation d’une société encore imprégnée de valeurs traditionnelles et religieuses.
Des crèches bondées, des infirmières surchargées
De nombreuses demandes d’adoption venaient de l’extérieur, des États-Unis (entre autres de Porto Rico), de la France, du Mexique, de l’Argentine, et de bien d’autres endroits encore. Les autres pays faisaient appel au Québec, car bien des familles voulaient adopter des enfants blancs, catholiques et en parfaite santé.
C’est ainsi que des centaines d’enfants sont partis vivre à l’étranger. Dans ce reportage, Enjeux vous présente les retrouvailles émouvantes de Jean-Marc et de Mario, deux jumeaux québécois séparés depuis 33 ans. Leur mère biologique, Nicole, les avait eus à l’âge de 14 ans. Les deux enfants avaient été adoptés dès la naissance par des familles étrangères et élevés dans deux pays différents, sans que leur mère n’ait été mise au courant, ni que les parents adoptifs ne connaissent leur situation.
Il y a deux ans, dans le cadre de la première partie du reportage Les enfants du péché, nous vous racontions que Nicole avait finalement retracé l’un des deux jumeaux en France. Cet été, elle a vécu le plus beau moment de sa vie, en retrouvant son deuxième enfant.
Enjeux vous présente également l’histoire d’autres enfants devenus grands, qui ont voulu retrouver leurs origines et leurs parents naturels. C’est le cas notamment de Zaida, qui a pu par chance remonter la filière grâce à des renseignements précieux consignés sur ses documents d’adoption. Zaida, une petite Québécoise élevée bien loin d’ici : « Je voulais la retrouver (ma mère). Elle devait se demander ce que je devenais. C’est dur. » Tous n’ont pas eu la chance de Zaida, de Jean-Marc et de Mario. Pour certains, la réunification n’a pas été possible.
Perdus dans les méandres de la bureaucratie..,
Ces adoptions s’effectuaient en toute légalité. Mais à côté de celles-ci, il y avait les autres adoptions, beaucoup moins légales. Dans les années 1940 et 1950, à Montréal, un important marché noir d’enfants s’organise. Ce commerce illégal d’êtres humains s’effectuait entre New York et Montréal. De riches familles juives de New York venaient à Montréal pour acheter des bébés, à prix fort.
Recoller les bribes éparses d’un passé que chacun veut taire
Une idée de l’ampleur du phénomène : la crèche Saint-Vincent de Paul a placé, en 15 ans, 1600 enfants aux États-Unis. |
C’est en 1954 qu’on a mis fin à ce trafic, à la suite d’une arrestation spectaculaire. Enjeux a rencontré des témoins de cette époque avec, entre autres, le sergent-détective qui a procédé à l’arrestation des coupables.
Journaliste : Kathleen Royer
Réalisatrice : Josée Dupuis